lundi 5 juin 2017

Les soeurs carmines, tome 1 : le complot des corbeaux d'Ariel Holzl

Le complot des corbeaux

Editions : Mnémos (collection "Naos", 2017)
263 pages

Résumé : Merryvère Carmine est une monte-en-l'air, un oiseau de nuit qui court les toits et cambriole les manoirs pour gagner sa vie. Avec ses soeurs, Tristabelle et Dolorine, la jeune fille tente de survivre à Grisaille, une sinistre cité gothique où les moeurs sont plus que douteuses. On s'y trucide allègrement, surtout à l'heure du thé, et huit familles d'aristocrates aux dons surnaturels conspirent pour le trône.
Après un vol désastreux, voilà que Merry se retrouve mêlée à l'un de ces complots ! Désormais traquées, les Carmines vont devoir redoubler d'efforts pour échapper aux nécromants, vampires, savants fous et autres assassins qui hantent les rues...

Chronique

J’ai adoré. Et pourtant, ce n’était pas gagné d’avance. Si j’aimais beaucoup la fantasy urbaine il y a encore quelques années, elle m’a lassée et rares sont les livres de ce genre qui parviennent désormais à m’emballer. Le côté léger et humoristique qui m’avait séduite au départ a un inconvénient majeur : on ne ressent pas le danger des personnages, on n’y croit pas. C’est vite lu, mais vite oublié. Sympathique, quoi. Alors, je l’avoue, j’ai commencé ma lecture avec quelques doutes, qui ont rapidement été balayés. Cette fantasy urbaine a peu en commun avec celles que j’ai lues jusqu’à maintenant. L’histoire ne se déroule pas dans notre monde, mais dans une ville où meurtres, violence et pauvreté sont lieus communs et où le fantastique s’inscrit dans la vie de tous. L’humour est noir et décalé, mais ne rend pas le récit « léger » pour autant. Il y a un petit quelque chose de Gail Carriger, surtout avec le personnage de Tristabelle, avec un humour presque « british », mais en plus incisif. Je ne me suis pas ennuyée une seconde, le rythme est soutenu, mais sans rendre le roman « survolé ». L’intrigue est intéressante et bien menée : j’aime ce type d’histoire où une action entraîne des conséquences qui s’accumulent et s’aggravent… et le style est fluide et parfaitement ciselé : les jeux de mots sont toujours intelligemment amenés, les phrases coulent toutes seules, sans anicroche. Pour un premier livre, il y a vraiment une qualité d’écriture qui m’impressionne.

On pourrait comparer ce récit à certains auteurs ou réalisateurs, Tim Burton notamment, avec l’univers particulier et l’humour noir. Mais je trouve qu’Ariel Holzl a réussi à créer un univers bien à lui et à nous livrer un roman très personnel et singulier, et c’est quelque chose de très fort lorsqu’on pense qu’il s’agit de son premier. Je suis très curieuse de voir ce qu’il nous réserve pour la suite, autant avec Grisaille que pour d’autres projets.

Le dernier point fort du roman, et pas des moindres, est ses personnages hauts en couleur. J’ai apprécié les trois sœurs, très différentes mais complémentaires. Étonnamment, je crois que ma préférée est Tristabelle, avec son caractère bien trempé et un flegme à toute épreuve, qui peut sembler frivole de prime abord, mais qui est indépendante et plus maligne qu’elle ne le laisse paraître. Merry est également un personnage très attachant, une jeune femme courageuse qui tente de faire au mieux pour sa famille mais parfois maladroite. Elle a de bonnes intentions mais se laisse parfois dépasser par les événements, ce qui la rend beaucoup plus humaine que la plupart des héroïnes de fantasy urbaine. Quant à Dolorine, j’ai été très surprise d’adorer les passages de son journal intime. Pourquoi surprise ? Je ne suis pas très « enfant » et je m’attendais à quelque chose d’un peu plus… bateau. Mais non seulement ces extraits permettent de faire avancer l’histoire et ont un réel intérêt pour l’intrigue, mais en plus ils sont très crédibles. Dolorine est un personnage débrouillard, à l’esprit vif, mais parfois un peu naïf. Son journal est souvent très drôle, car elle a une vision encore différente des événements de ses grandes sœurs.
Donc trois personnages féminins complètement différents mais tous forts et indépendants, sans toutefois les « super-héroïniser ». C’est très rafraîchissant.
Puis il y a les personnages secondaires, moins développés mais qui ne manquent pas de panache et de personnalité non plus. L’auteur parvient à les caractériser rapidement et à leur donner un réel intérêt, ce qui n’est pas forcément évident dans un format au final assez court.

En résumé, avec le complot des corbeaux, nous avons un roman fantastique à l’univers singulier, à la fois sombre et humoristique, mais d’un humour noir et décalé, porté par des personnages forts, attachants et bien dessinés et par une écriture ciselée. J’ai été très emballée par ma lecture et j’attends avec impatience de pouvoir découvrir la suite des aventures des sœurs carmines.


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