mardi 14 février 2017

Cadavre expo d'Hassan Blasim

Cadavre expo

Editions : Seuil (2017)
217 pages

Résumé : Il était une fois, dans les ruines d’un pays déchiré par la guerre et la terreur, des assassins transformés en artistes, et leurs victimes en œuvres d’art ; des soldats morts écrivant des romans d’outre-tombe ; des lapins pondant des œufs ; un sourire refusant de s’effacer d’un visage ; des couteaux disparaissant par magie ; des fantômes et des djinns ; des hommes cherchant par tous les moyens à fuir, sur les routes de l’exil ou de l’asile, l’effroi d’une existence tout entière régie par le théâtre de l’absurde et de la cruauté.
Les quinze nouvelles qui composent ce recueil déploient un univers d’une violence inouïe et d’une rare noirceur – illuminé cependant par l’enchantement de la poésie, de l’humour et de l’imagination. Entre le rire et la rage, l’insoutenable et le merveilleux, le trivial et le sublime, Cadavre Expo nous fait visiter le musée des horreurs de notre inhumanité quotidienne. Mais Hassan Blasim, jeune écrivain visionnaire, transcende l’atrocité pour nous offrir le tableau d’un monde carnavalesque singulièrement vivant.

Chronique

Cadavre expo est un recueil de quinze nouvelles autour de la guerre et de la misère, réussissant à traiter de manière différente ces thèmes à chaque histoire, avec un mélange de créativité et de réalisme particulièrement percutant.
Hassan Blasim est un conteur. Un très bon conteur. J’ai adoré l’écriture, fluide, très agréable à lire, mais aussi incisive et imagée. Je dois dire que même si la 4e de couverture m’avait convaincue de me lancer, j’avais tout de même une appréhension à la lecture de ce livre, surtout par rapport à son genre : j’ai du mal avec tout ce qui est littérature contemporaine, « blanche » comme on dit, sans fantastique ou policier. Or le style impeccable de l’auteur m’a tout de suite plongée dans ce recueil et j’ai lu les quinze nouvelles avec beaucoup de plaisir. Au moins celui de savourer cette belle écriture, implacable mais poétique.
Et pour les nouvelles en elles-mêmes, alors ? Elles sont souvent présentées comme si quelqu'un nous racontait une histoire : la sienne ou celle de quelqu'un d’autre. Cela donne une touche de réalisme supplémentaire et du rythme aux textes. Le seul « reproche » que j’aurais à faire, c’est l’impression parfois de lire un chapitre d’un livre, sans avoir le début, ni la fin. Par là, je ne veux pas dire que l’histoire est incompréhensible, mais plutôt que j’aurais aimé en lire davantage. Pour certaines, il y a un vrai potentiel de développement et j’ai trouvé parfois la fin un peu brusque, frustrante. Notamment, j’ai ressenti cela pour « l’exposition des cadavres », qui reste une de mes préférées, tant elle suinte d’humour noir, de cynisme et de créativité. Il y a tout un monde qui se dessine derrière cette nouvelle que j’aurais beaucoup aimé explorer.
La seconde nouvelle, « la boussole et l’assassin », représente mieux mon propos : il s’agit d’une nouvelle qui raconte une histoire dans une histoire (ce qu’Hassan Blasim fait à plusieurs reprises dans son recueil). Il y a donc une des deux histoires qui est bien « bouclée », mais la seconde (ou plutôt la première, celle avec laquelle le texte commence et termine) semble s’arrêter un peu brutalement. J’imagine que c'est volontaire, puisque ce sont des tranches de vie qui nous sont présentées, d’où cet aspect de n’avoir qu’un bout, un morceau de l’histoire. C'est un peu la même chose avec « le compositeur » ou « le chant des boucs ».
Pour d’autres textes, j’ai été impressionnée par la capacité d’Hassan Blasim à terminer ses nouvelles par une fin choquante, brutale, mais dans un sens extrêmement positif cette fois, avec quelque chose de très noir, cynique même parfois. Ainsi, j’ai adoré la fin du « fou de la place de la liberté ».
Mes nouvelles préférées sont « l’exposition des cadavres », « mots croisés », que j’ai trouvée magnifique et qui m’a beaucoup touchée. Si on ne prend pas en compte l’aspect fantastique du texte, il y a un aspect très réaliste dans les personnages, leurs relations, leurs histoires, qui est purement effrayante au vu de l’horreur du récit. « Le messie irakien » également, avec un personnage touchant également et « le dossier et la réalité ».
Mais je peux dire que j’ai apprécié la lecture de toutes ces nouvelles. Elles sont toutes poignantes à leur manière, dans leur évocation, frontale ou plus surréaliste, de la violence.


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